• Supposition d'enfant

    Pour faire court, dans cette affaire jugée en appel devant le parlement de Tournai en 1704, il s'agit de mère porteuse et d'adoption illégale !

     

    Un couple désespérément stérile mais point trop désargenté s'est laissé gagner par la tentation de se procurer un enfant.

    Il est assez facile de trouver une fille enceinte disposée à cacher sa grossesse et à abandonner son enfant - dans d'excellentes conditions, ce qui étouffe bien des scrupules - afin de préserver sa réputation, sauveur son honneur et conserver toutes ses chances de se marier ultérieurement selon sa condition. Il faut cependant se mettre d'accord très vite avant que les premiers signes de gestation apparaissent ce qui n'échappe pas au regard exercé des paysans habitués à suivre celles de leur cheptel. Il faut enfin soustraire la fille à la curiosité publique et lui assurer les meilleures conditions matérielles dans une maison de confiance pour quelle donne naissance à un enfant en pleine santé et retenir une nourrice. Enfin, il faut prévoir de rétribuer largement tout ce beau monde pour les dédommager de leurs peines, les récompenser de leur silence et éventuellement continuer à l'acheter.

    Les sages-femmes font de parfaits intermédiaires : dans le village et à la ronde, elles n'ignorent rien des dessous féminins lavés en famille. Si elles savent être compréhensives et d'une absolue discrétion, leur réputation leur amène des clientes fort embarrassées.

    Le couple en mal d'enfant a donc retenu la fille sélectionnée par la matrone locale, l'épouse a fait connaître son immense bonheur, s'est progressivement rembourré la silhouette tout en se préparant à accueillir le nouveau-né.

    Le jour "J", alertée par la femme de l'art, elle a si bien joué la comédie que personne n'a rien soupçonné. L'enfant a été baptisé sous le nom de l'époux... Malheureusement, malgré les soins les plus attentifs, n'en doutons pas, il n'a vécu que quelques semaines. Une seconde supercherie a été mise en oeuvre mais elle a cette fois éveillé des soupçons. Outre un doute sur le terme, la soi-disant accouchée a commis l'imprudence de ne pas rester suffisamment alitée et a fait ses relevailles le huitième ou neuvième jour seulement à l'église. 

    La rumeur est parvenue jusqu'à la justice du lieu qui s'est saisie de l'affaire. L'enquête a permis de confondre la matrone et la mère biologique qui furent emprisonnées et quelques complices. Un médecin a été commis pour "visiter" la prétendue parturiente. De nombreux témoins sont venus témoigner de ce qu'ils avaient observé, entendu dire ou imaginé, les commères du quartier, persuadées d'aider la justice à combattre l'amoralité, ont abondamment brodé autour de l'événement, confondant les protagonistes et ajoutant un ou deux nourrissons.

    Pas un mot sur le géniteur...

    Seule la matrone, fustigée et condamnée au bannissement à perpétuité, a subi les foudres de la justice.

    Méfiance donc quand un couple, resté longtemps stérile, se met subitement à avoir un enfant qui restera unique !

    ----------------------------------------------------------------------------------------------------------------

    Cumulus RDC 82/17 aux AD59.


  • Commentaires

    Aucun commentaire pour le moment

    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :